L’une des grandes découvertes de cette édition 2014 est une rétrospective d’une quarantaine d’images issues des archives de l’Argra (Association des photoreporters de la République argentine), fondée en 1942. Pour leur première exposition hors du pays, une sélection portant sur les 30 ans de la démocratie en Argentine est présentée en partenariat avec l’Agence Stock Photo, collectif québécois. L’une des membres, Caroline Hayeur, a commissionné cette exposition après avoir découvert le travail titanesque de cette association lors d’un séjour à Buenos Aires. L’un des photojournalistes présents, Horacio Paone, membre de l’ARGRA depuis 30 ans, l’a rejoint lorsqu’il vivait à Montréal et que la dictature sévissait dans son pays. Après plusieurs années d’absence à parcourir le Nicaragua, le Mexique ou le Canada, il décide de retourner en Argentine et de couvrir le début de cette nouvelle époque historique : la démocratie.
La lutte sociale n’en est pas moins terminée : il faut rétablir les droits de l’homme dans un pays traumatisé par ses disparus et exilés politiques, par l’impunité des bourreaux, par les procès des militaires responsables de milliers de morts… Les journalistes bénéficient alors d’un rôle essentiel car, censurés pendant des années, ils peuvent laisser place à l’information et dénoncer les injustices. Mais malgré la fin de la dictature, les photographes prennent encore des risques car de nombreux politiciens restent corrompus. En 1997, le meurtre de l’un d’eux provoque un soulèvement et décide l’Argra à occuper un statut officiel dans les tribunaux.
Au-delà de son rôle de défenseur, l’Argra est une structure diversifiée dont le président, Ezequiel Torres, inaugure sans cesse de nouveaux supports donnant accès à une culture de l’image, de l’histoire et de l’information, et rend hommage aux quelques 800 membres de l’association. Des publications régulières et expositions annuelles dans le prestigieux Palais des Glaces de Buenos Aires et les provinces de l’Argentine sont organisées. Un important service de conservation des archives a aussi été mis en place en collaboration avec l’Archive nationale de la mémoire. En 2011, un journaliste informe l’association que des milliers de négatifs se trouvent dans des sacs poubelle, devant un journal local. A l’ère du numérique, le périodique se débarrasse de ses archives, dont des images prises entre 1998 et 2006. Les membres de l’Argra réussissent à les récupérer, mais certaines seront détruites à jamais par l’eau. Archivo 21 et son équipe travaillent depuis sur la restauration de ce trésor. Une école de journalisme propose également un programme de formation. C’est aussi l’Argra qui, en accord avec le gouvernement, est responsable de l’attribution des cartes de presse. En 1951, Juan et Evita Perón, seront les premiers à l’afficher en public en guise de soutien aux journalistes.
Cette exposition représente 30 ans de la reconstruction douloureuse d’un pays ayant subi la répression et la censure, et exprime le besoin d’un peuple de retrouver une justice et les droits pour tous. Un pan de l’histoire trop longtemps gardé sous silence et dont les images sont encore à découvrir.
FESTIVAL
ZOOM PHOTO FESTIVAL SAGUENAY
Argra : 30 ans de démocratie Argentine
Jusqu’au 23 novembre 2014
Hangar – Zone portuaire
49, rue Lafontaine
Chicoutimi
Canada