La série La chute de Denis Darzacq met en scène l’évolution des corps dans l’espace urbain : à Paris et dans ses environs, des corps semblent tomber du ciel ou du balcon, anges déchus ou suicidés. Certains semblent en lévitations et rappellent la culture populaire des super héros, des jeux vidéo et des films de science fiction. D’autres créent une composition qui confronte l’organique au minéral, le corps vivant à la matière inerte et s’approchent ainsi de l’abstraction.
On pense bien sûr au Saut dans le vide d’Yves Klein ; mais ici point de trucage ni de travail numérique des images. Il s’agit de danseurs et de sportifs qui accomplissent des sauts que le photographe saisit au vol, dans un cadre préalablement composé. Le temps est suspendu, l’instant qui disparait habituellement dans le mouvement est à jamais fixé sur la pellicule.
Dans son travail, Denis Darzacq montre une facette différente de la ville et de ses habitants ; il s’intéresse à la relation entre ces éléments, à leurs entrelacements. Il ne s’agit pas de montrer Paris dans ce qu’elle a d’attirant ou de glamour – la ville s’efface au contraire pour n’être qu’un décor urbain quotidien – mais dans la relation qu’elle entretient avec les corps qui l’habitent, révélant ainsi une nouvelle poétique.
Une dynamique toute particulière se dégage de ces images. Si l’on ne sait ce que cache leur création, le paysage urbain semble déserté, abandonné. Personne ne marche dans la rue ou n’écarte discrètement le rideau pour épier les passants. La solitude du corps qui chute est amplifiée, la ville devient oppressante, le gris des images nous envahi. Le silence ne sera rompu que par le choque du corps contre le sol.
Pourtant, dès que nous apprenons le procédé de construction des images, dès que l’astuce est révélée, tout prend une autre dimension. Le silence oppressant laisse place à la concentration et une relation presque sensuelle se crée entre le corps et le décor. Ce corps pesant qui relie l’homme à son environnement, devient un instrument de liberté, de création. Il ne chute plus, il prend son envole.
Catherine Tanazacq de Stigliano
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Jusqu’au 3 juin
Alliance Française de Buenos Aires
Cordoba 946 – Buenos Aires
Argentina