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Biennale de Lyon : George Osodi, Rois du Nigéria

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Les artistes qui ont envahi les 3 lieux d’expositions de cette treizième Biennale de Lyon – la Sucrière, le « Mac Lyon » et le Musée des Confluences, sans compter les lieux extérieurs associés – sous le commissariat de Ralph Rugoff, Directeur de la Hayward Gallery à Londres, font preuve d’une vitalité rafraîchissante après plusieurs éditions qui s’enfonçaient dans des formes de récits plus ou moins obscurs…

Avec un titre simple et une problématique aisée à envisager (peut-être trop aisée au premier abord), « La Vie Moderne », ce sont plus de soixante artistes de nationalités différentes (dont 1/5ème sont français) qui explorent le caractère paradoxal de la culture dans différentes régions du monde et interrogent les multiples héritages de l’ère moderne.

Comme le dit Ralph Rugoff dans son introduction, « La vie moderne aspire à être un genre très particulier d’horloge – qui enregistre et évoque simultanément des fuseaux horaires apparemment incompatibles ou contradictoires. »

C’est bien ce que réussit à faire le photographe nigérian George Osodi, né en 1974 et basé dans la tentaculaire Lagos, où il pratique un photojournalisme à l’intérêt plastique évident. Que ce soient dans ses séries sur les Zimbabwéens de Johannesburg ou sur les travailleurs ghanéens des mines d’or, beaucoup de ses clichés ont déjà été publiés dans le New York Times comme dans le Guardian. Il a participé à la prestigieuse Documenta de Kassel en 2007, et exposé à la Photographers’ Gallery (Londres), au Museu da Cidade (Lisbonne) et au HMKV (Dortmund).

Pour la Biennale de Lyon, l’artiste a souhaité inclure quelques-uns des cent portraits qu’il a réalisés des Rois du Nigeria à  sa série « Oil Rich Niger Delta », qui illustre les ravages de l’économie pétrolière (le Nigeria en est le 11ème producteur mondial). Ce projet est destiné selon le photographe à montrer la complexité de l’histoire du Nigeria. Cette démocratie balbutiante, la plus peuplée d’Afrique, compte en effet encore plusieurs dizaines de monarques en exercice, à la tête d’autant de groupes ethniques ou de portions de territoire (on peut ainsi en trouver dans les bidonvilles de Lagos comme au fin fond du pays), qui ont conservé un pouvoir politique, symbolique et économique malgré leur déchéance en 1963.

Osodi s’est lancé depuis quelques années dans une exploration de cette histoire parallèle du Nigéria, en demandant audience aux potentats locaux, parcourant palais et salles du trône à travers tout le pays.

Il nous présente une collection de portraits très « bling-bling », dans la droite ligne des portraits royaux, de Louis XIV de Hyacinthe Rigaud, modèle du genre que tout le monde a en mémoire, de Napoléon Ier en costume de sacre par Ingres, déjà assis sur un trône pompeux, mais aussi du fugace Empereur Bokassa et son décorum de bazar qui reste dans les imaginaires comme une tentative de fusion avortée entre l’esthétique napoléonienne, la hauteur gaulienne et le folklore africain.

Rois venus d’un autre âge mais chaussant Ray Ban, couverts de tissus d’apparat, de bijoux, assis sur des trônes grandioses et improbables, flanqués de leurs proches, de leurs courtisans ou tout simplement d’objets traditionnels à valeur symbolique, ils ont parfois eu une première vie très différente – comme cette princesse du royaume d’Akure, auparavant Docteur en Pharmacie au Texas – et posent de plain-pied dans l’époque : les téléphones portables ne sont pas loin et des climatiseurs entrent parfois dans le champ du cliché, au-dessus des canapés de salons, quand ce n’est pas une magnifique berline décapotable dans la cour du palais.

Ces portraits valent aussi, à côté de la liturgie incarnée dans la personne royale, par ce qu’ils dévoilent des coulisses, de la décoration hasardeuse de ces salles du trône à la grandiloquence surannée, des serviteurs posant solennellement, portant armes coutumières ou instruments de musique, entrouvrant les cours intérieures des résidences princières.

En fait, George Osodi révèle un riche patrimoine culturel, qui s’est épanoui en parallèle à la colonisation européenne. Il tente de rendre hommage, sans crainte du ridicule, à l’Afrique et à son histoire ethnique, dans ce pays jeune qui a vu le rattachement voici à peine cent ans des parties Nord et Sud. Il souligne ainsi une unité possible au-delà des déchirements des attentats de Boko Haram et des nombreux affrontements ethniques et religieux.

ÉVÉNEMENT

XIIIème Biennale de Lyon
« La Vie moderne »
Du 10 septembre 2015 au 3 janvier 2016
La Sucrière
47-49 Quai Rambaud
69002 Lyon
France
http://www.lasucriere-lyon.com
http://www.biennaledelyon.com

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