Une collection de portraits photographiques réalisés en Inde parmi les plus importantes au monde est actuellement présentée au Museum für Fotografie de Berlin. Cet ensemble d’environ 300 photographies datant de la deuxième moitié du 19ème siècle offre une vision étendue sur la société et la culture indienne, avec un point de vue cependant européen et assurément colonial.
Cette exposition développe plusieurs thématiques à travers des ensembles de photographies variés. La première salle est dédiée à la Noblesse du pays : des photographies de familles de maharajahs, de princes ou de chefs de clans, prises dans leurs palais ou mises en scène dans des studios. On découvre à travers ces clichés très « posés » et que l’on l’imagine longuement préparées, les luxueux détails de tenues vestimentaires diverses selon les groupes culturels et chargées d’ornements, symboles de richesse.
Les images exposées ont été majoritairement réalisées par des studios britanniques renommés comme Samuel Bourne, Sheperd et Robertson, A.T.W. Penn et John Burke, qui étaient à l’époque à Bombay ou à Calcutta aussi bien équipés que ceux de Londres ; certaines ont cependant pour auteurs des photographes moins connus voire non identifiés.
C’est une société d’une grande diversité qui est dépeinte à travers les chapitres de l’exposition. Des photographies de rue en montrent d’autres aspects, bien différents du monde des palais princiers. Des catégories professionnelles très variées sont représentées : marchands, dresseurs de serpents, tisserands, ouvriers agricoles, guerriers, écoliers, comédiens, musiciens ou prostituées ; mais aussi des individus ayant choisis de vivre retirés de la société au sein d’ashrams.
Ces groupes socio-professionnels reflètent le système des castes, étudié avec curiosité par les colons à l’époque. Certaines images présentent aussi des populations très pauvres et mal nourries voire des situations de famine (à Bangalore), dans le but on peut le penser, de légitimer la présence britannique en Inde et son implantation dans la culture et l’économie locale.
Enfin, de nombreux clichés d’ordre « scientifique » sont exposés. Il s’agit d’études anthropologiques des ethnies peuplant l’Inde. Des hommes et des femmes sont photographiés de face et de profil ; ces visages sont répertoriés et accompagnés de commentaires notés dans des registres.
L’importante exposition « The Colonial Eye. Early Portrait Photography in India » nous en apprends ainsi autant sur la richesse culturelle de l’Inde à la fin au 19ème siècle, que sur la présence coloniale et son rapport ambigu avec l’ethnologie.
Eva Gravayat
The Colonial Eye. Early Portrait Photography in India
20 Juillet – 21 Octobre 2012
Museum für Fotografie
Jebensstrasse 2
10623 Berlin – Allemagne
L’exposition est organisée par Art Library – Collection of Photography, Ethnological Museum, Museum of Asian Art
Catalogue :
Koehler & Amelang, Seemann Henschel GmbH & Co. KG
Das Koloniale Auge. Frühe Porträtfotografie in Indien / The Colonial Eye. Early Portrait Photography in India.
Ludger Derenthal / Raffael Dedo Gadebusch / Katrin Specht (Hg.)
208 Seiten, 200 farbige Abbildungen, Hardcover, 25 x 31 cm. Price: € 39,90.
ISBN 978-3-7338-0387-2 (dt.); ISBN 978-3-7338-0389-6 (engl.)