Bien avant de devenir Sieff, Barbara (Rix) est déjà photographe. Dès son arrivée à Paris, en fait, parce qu’elle vit avec un reporter de guerre, parce qu’elle est devenue mannequin et parce qu’elle-même interroge le monde, un Leica en bandoulière, Barbara vit dans « une ambiance photographique », comme elle dit.
Bien sûr, quelques années plus tard, vient La Rencontre. Dans un studio photo, sur une prise de vue pour le magazine Vogue. Elle, le mannequin, Jeanloup Sieff, le photographe. A partir de là, la passion tourne au destin. Et lorsque deux enfants plus tard (Sonia et Sacha), Barbara arrête sa carrière de mannequin, c’est une évidence : la photographie devient son métier. Des femmes, des hommes, des nus, des portraits, des natures mortes, des paysages… Ses photos sont inclassables, « incatalogables ». Comme elle.
« C’est soudain une lumière, un bel espace, un truc qui se passe et aurait pu m’échapper. Je ne cherche rien, je trouve : un regard, une émotion… La beauté n’est pas que perfection, elle a, par moments, quelque chose d’étrange.»
Rien d’intellectuel dans sa démarche, rien de pensé. Beaucoup d’instinct. Même si, de fait, Barbara compose aussi, parfois, en esthète. Mais jusque dans ses photos de mode les plus léchées, par delà le sublime, c’est l’humain qu’elle traque. «Je n’aime pas les choses hyper comme il faut. Une femme magnifique, je l’aime aussi fatiguée, les plis ne me gênent pas… C’est l’humanité qui me trouble : les autres, tels qu’ils sont. »
Sous l’effet décapant de son objectif, déshabillé ou pas, tout le monde est à nu, avec sa vie qui dépasse. Et un arum peut devenir indécent, comme une fille sublime en nu intégral inspirer la pudeur. Rien jamais n’est exactement là où on l’attend. Il y a quelque chose de facétieux dans le regard de Barbara, quelque chose de ludique, une élégante désinvolture. Et elle le revendique : « Il ne faut prendre trop au sérieux ni soi-même ni l’art. Rien ne survit, ou si peu. Même une photo. C’est tellement rien par rapport à la vie en grand… Mais ce n’est pas grave. Ca donne un charme énorme à cette vie. »
Marie-Claude Tréglia
