Au Musée National du Mali, dans la salle des chefs d’œuvre d’art rituel, on découvre, dès l’entrée, ce qui est la vraie révélation de l’édition 2011 des 9èmes Rencontres de Bamako : Soungalo Malé.
Des portraits, encore des portraits de studio que l’on associe forcément à l’histoire de la photographie africaine diront certains. Oui, certes, mais tellement différents, tellement révélateurs des découvertes à faire encore, s’il est encore temps et que les archives n’ont pas été déjà détruites.
Soungalo Malé a travaillé dans la brousse, à la campagne, avec un studio ambulant, allant de village en village avec sa camionnette. On voit parfois, derrière un couple qui pose, le bas de la case en terre qui sert de fond. Surtout, alors que l’élégance de la pose, les robes bien disposées en corolle des femmes, le port digne de chacun, sont comparables à ceux qui illuminent l’œuvre d’un Seydou Keita, on sent une modestie, un endimanchement, une importance rare du moment photographique chez ceux qui fixent l’objectif. Il s’agit d’une cérémonie importante, pour laquelle on a choisi ses plus beaux vêtements, décidé de manifester ses sentiments, amoureux ou familiaux, de s’abandonner au photographe dans la pratique d’un rituel. C’est sublime de beauté, fragile et bouleversant. Et l’on veut en voir davantage. Parce que l’on sait que l’on éprouvera ce sentiment unique qui vous saisit lorsque vous vous trouvez, quelques mètres plus loin face à l’un des chefs-d’œuvre absolus de la sculpture – pas seulement africaine – quand un Giacometti en bois supporte la tête penchée d’un visage à la Modigliani. On y retourne sans cesse, comme on retournera tenter de déchiffrer le mystère des regards purs des modèles de Soungalo Malé.
Christian Caujolle