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Avignon : La Photographie au Théâtre avec « Ma femme m’a fait une scène et a effacé toutes nos photos de vacances »

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Ma femme m’a fait une scène et a effacé toutes nos photos de vacances

Au festival de théâtre d’Avignon, à quelques kilomètres d’Arles où les Rencontres Internationales de la Photographie battent leur plein, le jeune collectif estonien Teater 99 met lui aussi la photographie à l’honneur.
« Ma femme m’a fait une scène et a effacé toutes nos photos de vacances » : c’est le drame du personnage principal de cette pièce. Il rêve de reconstituer cet album disparu, « flingué » par sa femme, les 32 gigas effacés de la carte mémoire. Avec les autres personnages, ils vont essayer de poser et de rejouer les scènes de ses vacances.
Tout commence dans une chambre d’hôtel blafarde, ornée de deux photographies de sphinx dorés, clichés exotiques impassibles. Fébrile, pris de tics et inquiet, le personnage principal arpente la pièce. Un flash, et des inconnus apparaissent, prêts à rejouer pour lui toutes les images de l’album de famille disparu. Les sourires dans l’avion, le restaurant, la fatigue le soir à l’hôtel, la plage, la randonnée… Entre ces quatre murs, ils reconstituent les clichés du bonheur familial. Leurs photos noir et blanc sont projetées en temps réel sur un grand écran.
Et puis tout dérape. L’appareil photo est aussi un jouet, et peu à peu, les autres personnages s’en emparent, ils imaginent des scènes hors programme. « La photo suivante, c’est un baiser au soleil couchant », propose l’un d’entre eux. Puis ce sont des images de fête, de plongée sous-marine, de guerre, la recréation d’icônes célèbres, de scènes de film…
Comment pouvaient-ils, en effet, reproduire exactement les désirs d’images du personnage principal, trop précis, irremplaçables ? « Tes souvenirs sont si parfaits, à quoi bon faire des photos ? » lui demande celle qui joue sa femme. « J’ai besoin de photos exactes, si je ne les récupère pas tout devient brumeux », répond-il. Ce qu’il cherche, au fond, ce ne sont peut-être pas ces photos si parfaites, manifestes d’un bonheur cosmétique, mais ce qui a déraillé, ce qui n’est pas rentré dans la boîte : « Tout a été une erreur », conclue-t-il.
C’est la pièce numéro 51 du collectif estonien Teater 99. Ils ont commencé au numéro 99, dont ils tirent leur nom, et remontent, pièce après pièce, jusqu’à zéro. Cette fois-ci, leur travail interpelle les photographes. Ene-Liis Semper, cofondatrice de la troupe, confiait à l’AFP : « le plus beau compliment qu’on ait eu est venu de photographes qui assistaient à la générale photo. Ils nous ont dit qu’ils étaient tellement captivés par le travail qu’on faisait sur la photo qu’ils en oubliaient de prendre leurs propres photos de la pièce! »
Cette pièce drôle et provocatrice interroge notre besoin de tout photographier. Ene-Liis Semper explique : « ce qui est intime est commun à tout le monde. Pourquoi l’image du bonheur serait-elle celle-ci ? » Ces images sont des trophées, elles valident nos rites de passage, certifient le bonheur familial et cristallisent les souvenirs. Pas d’expérience sans témoignage, pas de fête sans appareil photo, pas de vacances sans album.

http://www.festival-avignon.com
http://www.no99.ee/en

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