A l’opposé d’une approche spontanée de la photographie, Pawel Żak revendique la dimension « fabriquée » de ses images. Avec une grande économie de moyens et à partir d’objets de la vie quotidienne, cet artiste polonais construit des mises en scènes minimales, où l’action se déroule sans personnage, mais dont l’homme reste le sujet principal.
Pawel Żak se définit comme « un artiste visuel qui utilise la photographie ». Cette distinction s’illustre dans son processus de création, qui s’attache davantage à produire des « images intérieures » qu’à transcrire le monde réel. « J’ai senti que ce n’est qu’à travers une image fabriquée que je m’exprime pleinement. » dit-il, « la réalité m’intéresse, mais j’ai besoin d’une image que j’ai conçue et que je contrôle parfaitement. »
Ses clichés sont le résultat d’une lente maturation, qui commence par une idée et se matérialise d’abord sous la forme d’un croquis. L’artiste approfondit cette première impression jusqu’à composer les mises en scène qui donneront lieu à ses photographies. Celles-ci prennent la forme de véritables tableaux qui en évoquent d’autres : ceux de la peinture hollandaise du XVIIe siècle, mais aussi certaines œuvres de l’art abstrait.
Avec Still Life, sa série la plus récente, l’artiste poursuit son exploration de la nature morte. Dans un espace non identifié, une table est recouverte d’une nappe blanche : symbole de partage et de réunion, évoquant aussi bien le rite que la fête, ce décor minimal voit surgir des objets ou des événements qui font glisser l’imagination du côté du hors-cadre et de l’absence : ce qui se passe sur la table nous interroge sur ce qui se passe autour. Comme toujours dans les natures mortes, et depuis l’origine même de ce genre multiséculaire, l’objet est l’homme lui-même. Il est celui pour qui l’on dresse la table, celui qui se délecte ou se divertit de ce qu’elle offre, mais aussi celui dont la nature se reflète dans ces plaisirs vaniteux et périssables.
Avant « Still Life », Pawel Zak s’était confronté une première fois avec la nature morte avec la série Tales (1996-2000). A l’occasion de la naissance de son premier enfant, l’artiste engageait une réflexion sur le monde de l’enfance, « ce monde où la réalité se mélange à l’imagination ». Sorte de journal intime de cette période, la série se nourrit de cette expérience. Chacun des clichés de la série, réalisée en argentique, est une scène de théâtre sur laquelle il dispose des objets de sa vie quotidienne, dans un décor composé de morceaux de carton. L’effet de flou et les ombres profondes plongent ces mises en scène dans une atmosphère mystérieuse, que l’artiste accentue encore au moment du développement et du tirage, en multipliant les bains chimiques jusqu’à obtenir la teinte qu’il recherche, toujours unique.
Dans ce petit théâtre fantastique, les objets du quotidien se dépouillent de leur aspect ordinaire pour participer à un récit extraordinaire. Le photographe les investit d’une intensité qui donne libre cours à l’imagination du spectateur. La série Tales, qui a marqué l’émergence de Pawel Żak sur la scène internationale de la photographie contemporaine, a été distinguée en 1998 par le Prix Broncolor de la lumière lors du concours européen de photographie de Vevey (Suisse).
Pawel Żak
Pawel Żak est né en 1965 à Varsovie (Pologne), où il vit et travaille encore aujourd’hui. Diplômé de l’École des Beaux-Arts de Poznan, il a participé depuis 1994 à plusieurs dizaines d’expositions collectives et à des dizaines d’expositions individuelles en Pologne et à l’étranger. Son travail a notamment été présenté aux Rencontres Internationales de la Photographie d’Arles en 2004. Ses œuvres font partie de collections publiques telles que celles du Musée national de Varsovie, du Centre d’art contemporain de Varsovie, du Musée d’art de Lodz et de la BNF à Paris.
Plus d’informations
Biographie, interview-vidéo et portfolio de Pawel Żak sur le site de la galerie Artistics :