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Art Paris Art Fair 2016 : Rencontre avec Sang-A Chun, Commissaire Corée 

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Pour l’édition 2016, Art Paris Art Fair accueille quelques 143 galeries issues de 22 pays. L’accent cette année est mis sur la scène européenne et le pays d’honneur invité: la corée avec la commissaire Sang-A Chun qui a sélectionné 80 artistes et des évènements annexes, des années 60 aux pratiques artistiques actuelles. Innovation cette année avec les expositions itinérantes de Bus Expo sur les cars Air France qui sillonnent la capitale jusqu’à la mi avril.

Marie de La Fesnaye a rencontré Sang-A Chun, commissaire pour la programmation coréenne.

Comment avez vous répondu à l’invitation d’Art Paris Art Fair ?

Avec grande joie bien sûr ! Je préparais déjà différents projets pour ce grand événement de l’année croisée France-Corée, notamment l’année de Corée en France afin de participer à la promotion de la création contemporaine coréenne que je fais d’ailleurs à travers le programme des expositions d’art contemporain coréen au Centre Culturel Coréen à Paris. L’invitation d’Art Paris Art Fair au commissariat du projet coréen était donc une excellente opportunité pour moi de faire découvrir au public français et international les différentes facettes de l’art coréen contemporain.

Une plateforme est proposée autour de 8 galeries de Séoul, en quoi sont elles emblématiques de l’effervescence de la scène artistique coréenne ?

Gana Art Gallery et Park Ryu Sook Gallery de Séoul font partie des galeries importantes historiquement parlant. Gana art a diverses activités : galerie d’art, résidences d’artistes, art shop, magazine, atelier de céramique, de gravure, etc., avec d’importants artistes historiques tels que Youn Myeung-ro, Oh Sufan mais aussi artistes émergeants (Hur Shan, Yi Hwan Kwon..). Park Ryu Sook gallery est l’une des premières qui a ouvert ses porte au fameux quartier Gangnam de Séoul. Elle a contribué à établir la carrière de certains artistes coréens de renommée internationale (Kim Tschang Yeul, Park Seo-Bo, Chun Kwang Young…). Elle travaille toujours très activement dans cette optique avec des artistes qui sont maintenant au premier plan l’art coréen contemporain (Choi Jeong Hwa, Km Joon). Gallery Simon, quant à elle, représente des artistes qui ont déjà eu une reconnaissance internationale (Moon Beom, Noh Sang-Kyoon) mais aussi dans un renouvellement constant, elle recherche de jeunes talents (Kim Ji Eun, Lee Changwon…).

313 Art Project est une galerie qui monte avec un programme puissant, notamment programme établi dans l’esprit d’échange avec la France (présentant le travail de Daniel Buren, de Sophie Calle, de Xavier Veilhan…). La galerie met en œuvre une installation symbolique de cette édition dédiée à la Corée, Flash Wall de Park Kiwon qui renvoie l’image de Corée, celle d’un unique pays au monde divisé en deux, avec message de paix à tous ceux qui ont subi l’injuste violence du terrorisme.

Paik Hae Young Gallery a conçu un projet spécial pour l’édition coréenne à Art Paris sur le thème de « Simple et Splendide », avec les œuvres de trois artistes photographes (Koo Bohnchang, Kim Dokyun et Lee Jungjin) qui conjuguent la modernité et la tradition dans leur sujet traité, support et méthode de travail. La galerie met en place également une œuvre numérique d’un duo d’artistes col.l.age+ (Jang Sho et Kim Min) qui sera projetée sur la façade du Grand Palais.

UM Gallery présente deux artistes d’avant-garde des années 1960 et 1970 (Kim Kulim, Lee Kun Yong) qui reviennent au goût du jour ou plutôt ce sont des artistes dont le travail est en cours de remise en valeur par les historiens d’art coréens et au niveau institutionnel, vu l’inventivité et la singularité de leur travail.

En Corée, il y a un nombre important de galeries à la capitale mais aussi en province. Nous avons Gallery Shilla de Daegu qui affiche sa direction artistique pour l’art abstrait à travers des artistes coréens et étrangers, tels que Suh Seung-Won, Lee Kang-So, Shim Moon-Pil (l’un des six artistes sélectionnés dans le programme de projection façade), Kishio Suga, Niele Toroni… Et SoSo Gallery est une jeune galerie située à Paju, près de la frontière, coréenne, avec une excellente sélection d’artistes qu’elle dépend (Kim Inkyum, Kim Yun Soo, Chung Seung Un…).

Près de 80 artistes coréens sont présents sur la foire, partagent-ils des préoccupations et une vision commune ?

Nous avons un large éventail d’artistes de différentes générations ayant diverses méthodes d’expression. Il y a des thèmes récurrents (quête d’identité, recherche de la spiritualité à travers des gestes, des matériaux spécifiques… notamment chez les aînés) mais aussi thèmes très diversifiés chez les artistes de jeune génération, par exemple, s’interroger sur le rôle de l’art dans la société actuelle ou le statut de l’œuvre d’art et de l’artiste, en partageant probablement les mêmes préoccupations que les artistes occidentaux. Les particularités du travail de ces artistes coréens se résident, en partie, dans la situation quelque peu paradoxale où ils vivent, qui est celle d’un pays officiellement en guerre. Ils travaillent sur ce thème de frontière, qui est à la fois présente (physiquement) et absente à l’écart de leur vie réelle (relativement confortable et paisible). Le regard de ces artistes se tourne continuellement vers les innombrables fractures qui divisent la société coréenne, tout autant que vers divers horizons qui s’ouvrent devant eux, et ils en livrent leur vision en privilégiant l’utilisation de nouveaux médias et de techniques mixtes.

Mondialisation, urbanisme galopant, individualisme, perte de cohésion et de sens, la Corée du sud se transforme à grande vitesse, comment les photographes s’en saisissent et le traduisent ils ?

La photographie coréenne a évolué au fil des différentes étapes. Les œuvres des photographes de la première génération représentaient le réalisme de la vie courante dans le genre documentaire et de reportage bien formaliste. De la fin des années 1970 au début des années 1980, les photographes ont commencé à s’affirmer avec leur vision personnelle de la photographie, proprement dit. Ce n’est que dans les années 1990 que la photographie coréenne prend place comme l’une des disciplines artistiques à part entière dans la création contemporaine. Les artistes expérimentent ce médium, la frontière des disciplines entre photographie et peinture ou sculpture, deviennent désormais ambigües.

Nous trouvons beaucoup d’œuvres photographiques issues d’un processus complexe, très élaboré. Par exemple, le travail de Gwan Osang (Galerie Paris-Beijing) se nomme « Deodorant type » qui revendique une attitude novatrice à travers l’effacement et le dépassement du sens commun voire la transgression des frontières entre les domaines artistiques. Ses sculpture-photographiques constituées de nombreuses images collectées sur l’internet, représentent l’homme d’aujourd’hui qui apparaît comme une image virtuelle sans profondeur contrairement au travail en volume qui en résulte. Alors que Chun Kyungwoo (Galerie Andres Thalmann) essaie de saisir l’homme « réel » en relation avec l’autrui, le temps et l’espace qui l’entoure. Et il remet en question la photographie en tant que médium associée à l’instant capturé et instaure le temps de pose prolongé afin de libérer une part de vérité de son modèle.

Les jeunes photographes coréens d’aujourd’hui s’intéressent ainsi à des individus qui vivent dans la société en mutation mais aussi à leur cadre de vie qui sont constamment affecté par le processus d’urbanisation et le système social en Corée.

Parmi lesquelles, Jung Jihyun remet en cause la ville comme espace de vie, à travers sa série de photo « Demolition Site ». Elle critique la reconstruction ou la rénovation promettant de fournir plus de confort aux habitants alors que cela ne vise qu’au bon fonctionnement de système d’habitation et de gestion de la population. Keum Hyewon dévoile les faces sombres et cachées de la ville, par exemple, le terrain de décharge avec sa série « Urban Depth ». Observer des choses banales et habituées avec un regard étranger et extérieur révèle de l’inattendu et beaucoup de surprises.

Vous allez aussi découvrir à Art Paris des pionniers de la photographie coréenne contemporaine dont le travail est orienté vers la recherche de l’esthétique et de l’âme coréenne. Bae Bien-U (Galerie RX) invite les spectateurs à la méditation et à l’introspection à travers des éléments de la nature coréens (arbres, vents, volcans, rivage) et Koo Bohnchang (Paik Hae Young Gallery) avec la jarre de Lune coréenne (Dal-Hang-A-Ri), ronde mais non parfaite, dépourvu de tout artifice, laissant la trace du temps, que le photographe essaie d’incarner dans ses œuvres.

Une large programmation est organisée également hors les murs, comment l’avez vous conçue et autour de quels enjeux ?

Les programmes hors les murs dont le parcours VIP avec les institutions parisiennes ont été conçus et organisés par l’équipe Art Paris. Je suis intervenue uniquement sur la table ronde intitulée « Art contemporain coréen : tracer le passé, éclairer le présent » au Centre Culturel Coréen le 1er avril du 18h à 19h30 ou le programme vidéo « Living on the Border » au Silencio club du 29 mars au 2 avril entre 18h et 20h (horaires variables en fonction des dates). J’ai développé également un programme de performances intitulé « Rituals » pour la foire avec deux artistes coréennes, Yeesookyung et Hong Young In. À travers ces programmes, je souhaite présenter de manière globale (ou plutôt partielle, puisque ce ne peut qu’être partiel en réalité), l’art coréen et son évolution (depuis des années 1960 jusqu’à aujourd’hui), et aussi relever ses particularités et enjeux sur la scène internationale, enfin faire découvrir l’art coréen au public français et international dans une nouvelle perspective.

FOIRE
Art Paris Art Fair
Du 31 mars au 3 avril 2016
Grand Palais
75008 Paris
France
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http://artparis.com

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