Diplômé de l’ENSP en 1992, Christophe Berthoud collabore comme historien de la photographie.
Invité aujourd’hui à revisiter la production des Alinari entre 1852 et 1920, Christophe Berthoud a choisi de rendre compte de la diversité des thèmes et des genres abordés à travers le dispositif combinatoire mis en oeuvre par l’écrivain Italo Calvino dans son recueil de récits Le Château des destins croisés. Cette année 2012 marque en effet le 160ème anniversaire de la maison, aujourd’hui fondation située à Florence. Cette continuité fait d’Alinari la plus ancienne firme photographique au monde. Lieu vivant et lieu de mémoire, Alinari continue à jouer un rôle majeur dans le paysage photographique, comme éditeur de beaux livres, musée de la photographie et détenteur de fonds photographiques, acquis depuis les années 1930, comme agence de diffusion en ligne d’images.
Intitulée Les Archives Alinari et la syntaxe du monde, l’exposition s’organisera à partir des lames du tarot de Marseille que Calvino utilise comme « machine narratrice », reproduites dans les marges de son texte et dont les combinaisons seront présentées au mur comme fil conducteur de l’accrochage. L’exposition rendra également hommage à l’un des écrivains italiens les plus populaires en France et à son apport à l’ouvroir de littérature potentiel, l’Oulipo, où il rejoint Raymond Queneau et Georges Perec en 1973, et dans l’esprit duquel Le Château des destins croisés s’inscrit explicitement.
“La carte blanche proposée par François Hebel a été intimidante pour moi. J’ai alors envisagé l’exposition sur un plan plus personnel. La forme vient de plusieurs facteurs. Je me suis concentré sur la production Alinari. Rendre compte en 80 images de la richesse des sujets sans en faire une exposition scientifique. Je n’étais pas légitime pour cela, j’ai donc adapté un dispositif pour traduire plastiquement la richesse du fond. Je suis allé chercher dans mon bagage littéraire pour rendre compte de son extrême richesse, un projet expérimental en quelque sorte. L’inspiration oedipienne donne le rythme à l’exposition. La présence des cartes de tarots apportent l’idée de narration. Leurs suites forment alors des phrases.”
De son statut d’étudiant, Christophe Berthoud a “vécu le fruit d’un instant précis dans la vie de l’école”. “Il n’y avait pas encore le tournant “école d’art” que l’on connaît aujourd’hui. Et aujourd’hui, si c’était à refaire ? Difficile de répondre à la question, l’école a été un passage important. J’aurais peut-être fait l’école du patrimoine, mais à l’époque je n’avais pas de plan de carrière. Arles a été une prise de conscience. Je me suis construit dans ses murs. Elle a été essentielle dans mon parcours professionnel. “
“Nous avons été isolés, comme dans un monastère. Ces trois années m’ont beaucoup cultivé. Les échanges ont été denses; j’aurais aimé qu’elles soient plus tournées vers l’extérieur. Les contacts entre élèves ont été très formateurs. J’ai pris conscience que je voulais être commissaire d’exposition.”
“L’école m’a apporté une éducation artistique, bien au-delà de mon bagage littéraire de l’époque. J’étais assez inculte à tout cela. Je n’avais pas de plan de carrière, juste un énorme désir d’images. Très vite, je savais que ce serait l’écriture. Cela s’est confirmé avec ma rencontre avec Bernard Plossu.”
“J’ai aimé pratiquer. Le cours intitulé “Le musée imaginaire” m’a beaucoup marqué. C’était en troisième année. Alain Desvergne insistait sur la notion de “Gens d’image”. La remise en question a été forte durant la formation mais je précise que je n’ai jamais été frustré personnellement.”
Samantha Rouault et Wilfrid Estève.