C’était le temps des insouciances, des libertés, c’était le temps de la fin d’une époque, la fin des 30 glorieuses économiques qui ont propulsé le monde occidental dans l’ère technologique. Nous sommes à la charnière qui bascule les sociétés occidentales dans l’ère numérique. En 1983, l’ordinateur devient individuel et entraîne l’ensemble de notre univers analogique dans l’espace virtuel de l’analyse et de la recomposition numérique. C’est une vraie révolution pour une immense majorité alors que ce ne sont que de nouvelles formes d’outils à maîtriser pour les créatifs.
En 1983, toutes ces réunions informelles et « bon enfant » de photographes venus du monde entier sont en pleine adolescence (14 ans déjà … on a jamais le temps de voir s’enfuir le temps). Cette manifestation qui s’affirme et se reconduit annuellement, au début de l’été, attirait déjà les grands photographes, les futurs grands photographes et l’ensemble de la profession qui considère que Arles (et sa place du Forum) est un carrefour encore parfaitement incontournable pour tous leurs échanges d’idées et de savoir-faire.
Dans ce début des années 1980, alors que l’informatique commence à prendre la main sur l’ensemble du processus de constitution d’une image, les Rencontres Photographiques d’Arles se formalisent progressivement et se réglementent pour atteindre cette forme de paroxysme que nous connaissons aujourd’hui. Ainsi va l’évolution de ce groupement de copains, à l’imagination débordante, vers une structure mercantile de la manifestation la plus symbolique autour des œuvres photographiques.
C’est dans ce contexte que le photographe belge Bernard Gille, assistant de Lucien Clergue, très impliqué dans les différents aspects des Rencontres de l’époque, réalise son idée de « tirer le portrait » en neuf secondes, des divers participants présents.
C’est parmi ses nombreux portraits argentiques qui ont été numérisés que j’ai extrait, en symbiose avec l’auteur, 25 œuvres qui me semble bien représenter tout le potentiel des effervescences de cette époque dont il est possible de mesurer l’impact et le rayonnement. Après un demi-siècle d’existence, il est bien de tourner la tête, même rapidement, pour apprécier le chemin parcouru par tous ces passionnés des photographies.
Malheureusement nombre de ces protagonistes nous ont abandonné, tel est le constat 35 ans après avoir été immortalisés sur les pellicules de Bernard. Mais, leurs œuvres si souvent remarquables restent figées pour l’infini pour peu que les générations futures acceptent d’en prendre soin. C’est avec l’enthousiasme de l’époque que je vous invite à venir voir ou revoir quelques-uns des plus grands créateurs entre les deux siècles à travers cette démarche créative reflet de l’anti-formalisme de cette période.
Thierry MAINDRAULT, commissaire.
Bernard Gille : « Neuf secondes avec … »
01 juillet – 31 octobre 2019
Hotel Atrium
01 rue Emile Fassin 13200 Arles
