Observer les territoires, témoigner de leur évolution, tels sont les objectifs principaux du travail d’Anne-Marie Filaire depuis plus de 25 ans. Tout a commencé en Auvergne où elle a participé à l’Observatoire photographique du paysage, missionnée par le ministère de l’Environnement, en 1992. Puis, c’est au Moyen-Orient et en Mer rouge qu’elle choisit de se rendre où, inlassablement jusqu’à récemment, elle retourne pour documenter, par le paysage principalement, cette région du monde, « de façon informelle », comme elle le dit elle-même.
Israël-Palestine (1999-2007) ; Yémen-Erythrée (2000-2005) ; Beyrouth banlieue Sud-Sud-Liban (2006) ; Frontière Jordano-Syrienne (2014) : quatre séries pour des territoires meurtris par l’histoire qui évoluent au rythme des conflits opposant les Etats dans des guerres ponctuelles mais aussi et surtout les populations dans des affrontements quotidiens. Intifada, construction du mur de Gaza, frontières redessinées… Anne-Marie Filaire aborde tous ces sujets en filigranes dans ses différentes séries car, contrairement à un reporter, elle ne cherche pas à en décrire les faits. A l’inverse, elle photographie souvent le vide, le non-événement ou cherche à prélever des traces. Cette démarche documentaire personnelle et intime a conduit la commissaire d’exposition Fannie Escoulen à proposer un parcours où les images ne sont ni rangées par série ni présentées chronologiquement mais par zones. Un parti pris qui place le spectateur entre deux : entre le réel et la fiction, entre les événements historiques d’un côté et le ressenti de l’artiste de l’autre. Un choix qui autorise le détachement et invite à profiter, aussi, de la beauté des images, pour la plupart en noir et blanc. Par des détails ténus et par petites touches – comme cette photographie montrant un bout de route au milieu de nulle part –, la photographe souligne l’absurdité et la complexité de la situation de cette région du monde, lointaine et en même temps si proche de nous. Comme Anne-Marie Filaire le dit elle-même : « Avec le paysage, on peut tout dire ».
Sophie Bernard
Exposition
Anne-Marie Filaire, Zone de sécurité temporaire
Du 4 mars au 29 mai 2017
Mucem
Fort Saint-Jean,
Bâtiment Georges Henri Rivière (GHR)
Marseille
Livre
Anne-Marie Filaire, Zone de sécurité temporaire
Coédité par Textuel et le Mucem
55 €