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Actes Sud : Laurence Aëgerter : Ici mieux qu’en face

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L’art de l’évasion de Laurence Aëgerter par Fannie Escoulen

Depuis les prémices de sa pratique artistique il y a une quinzaine d’années, Laurence Aëgerter puise au cœur du réel son inspiration, sa matière à penser et à créer. Véritable touche-à-tout, elle absorbe ce qui l’entoure, et remet perpétuellement en question les règles préétablies de nos existences, déjouant sans cesse nos codes de représentation. Elle aime retourner les situations, les regards, et propose sur le principe du miroir ou du trompe-l’œil un autre champ des possibles à une réalité souvent devenue inacceptable, ou trop immuable.

Laurence Aëgerter cultive depuis l’enfance un goût passionné pour les tableaux et les antiquités, les encyclopédies et les manuels pratiques, les catalogues de musée ou encore les images vernaculaires. Fascinée par les plus grandes œuvres de l’histoire de l’art comme par les plus petits objets du quotidien, elle s’émerveille sans relâche de la beauté du monde et de l’infinité de ses perceptions sous-jacentes.

Les dispositifs qu’elle imagine, entre illusion et réalité, participent d’un même désir d’échappatoire. C’est en révélant, dans un geste de réappropriation, l’envers du réel qu’elle construit ses histoires. Ses scénarios provoquent des collisions, des glissements, et le hasard et l’imaginaire s’invitent à sa table de création. D’autres protocoles, plus stricts, opèrent au sein de son œuvre des déplacements et des transpositions. La superposition, la juxtaposition, l’apparition et la disparition ou le dédoublement sont autant de stratégies qui lui permettent de créer de nouvelles formes et de nouveaux mouvements historiques, sociologiques et artistiques.

Les correspondances visuelles, sémantiques, poétiques qu’elle active avec les icônes de nos inconscients collectifs, font coexister des images qui l’habitent afin de leur donner d’autres vies. Dictionnaires, livres d’histoire, images d’archives ou glanées sur Internet, objets d’art et autres supports usuels qu’elle s’emploie allègrement à transformer deviennent le ferment d’une œuvre qu’elle construit inlassablement, pierre après pierre. L’appropriation de cette matière protéiforme agit sur son imagination et ouvre la voie à nombre d’expériences : photographies, livres d’artiste, installations in situ, tapisseries, projets collaboratifs sont le reflet de la prolixité de son parcours, sans cesse enrichi du besoin impérieux de se nourrir du monde.

Le cycle du temps est primordial dans son travail. Ce temps qu’elle soulève et reconstruit, l’égrenant tel un rosaire, en lui appliquant de nouvelles strates. Elle convoque notre mémoire et les réminiscences d’un passé auquel elle est profondément attachée, comme pour mieux le réparer, l’embellir ou le transfigurer. En cela, elle fait sienne la philosophie de Clément Rosset lorsqu’il écrit dans Le Réel et son double : “Le présent serait trop inquiétant s’il n’était qu’immédiat et premier. Il n’est abordable que par le biais de la re-présentation. Il n’est acceptable que sous un double plus digeste que l’original.” Souvent dans ses pièces, la perception du temps s’appréhende en une expérience vivante de la lumière et de la matière, où la fugacité du moment présent fait face à la sérénité de l’intemporel.

Fannie Escoulen

 

Laurence Aëgerter : Ici mieux qu’en face

Fannie ESCOULEN

Léa BISMUTH

Susana GÀLLEGO CUESTA

Taco HIDDE BAKKER

Publié par Actes Sud

22.00 x 30.00 cm

244 pages

ISBN : 978-2-330-14066-3

Prix indicatif : 42.00€

https://www.actes-sud.fr/catalogue/arts/ici-mieux-quen-face

https://www.actes-sud.fr/

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