A travers une multitude de témoignages, cette exposition au Musée d’Art Multimédia de Moscou (MMAM) rend hommage aux victimes des répressions de 1937, surnommées « Grandes purges » et qui constitue l’une des pages noires de l’histoire de l’URSS.
Elle est constituée de documents d’archives uniques dont une grande partie n’a été déclassifiée que ces dernières années : il s’agit de journaux, de photos, d’actualités cinématographiques, d’interviews avec d’anciens détenus ; d’objets ayant fait partie de la vie et du quotidien des prisonniers du Goulag: barbelés, portes et fenêtres de cellules, vestes ouatinées et chaussures de détenus qui devaient parfois utiliser de vieux pneus de voitures en guise de semelles. On y trouve aussi lettres et dessins de détenus du Goulag passés au crible de la plus rigoureuse des censures ; circulaires réglementant cette censure ; ou encore ces « lettres du convoi », nom que l’on donnait aux notes et messages grattés sur n’importe quoi que les détenus arrivaient à jeter sur la voie des wagons clos qui les emportaient vers les camps.
Une des sections de l’exposition, une des plus poignantes, est consacrée au champ de tir de Boutovo, lieu d’exécutions de masse et d’ensevelissement des victimes des répressions staliniennes, le plus important dans la région de Moscou. On connaît aujourd’hui les noms de 20760 personnes qui y ont été exécutées d’août 1937 à novembre 1938. L’exposition donne la liste de leurs noms.
On y découvre aussi une projection de diapositives du Goulag. Ces photos de face et de profil montrent que l’appareil répressif broyait n’importe qui sans distinction, y compris les grands du monde des lettres, des arts, de la science, les chefs militaires, les dirigeants d’Etats, et même ceux qui organisaient et réalisaient les répressions.
L’exposition met aussi l’accent sur les destinés de cinq héros – éminents scientifiques, écrivains, artistes. Il y a d’abord Segueï Korolev, un des fondateurs de l’astronautique, constructeur en chef des technologies spatiales et des armements en missiles de l’URSS. C’est sous sa gestion que fut préparé et réalisé le lancement du premier satellite artificiel de la terre (1957), le vol de Youri Gagarine (1961), la première sortie de l’homme dans l’espace (le cosmonaute Alexei Léonov en 1965). Serguei Korolev fut détenu au Goulag de 1938 à 1944. Il est mort pendant une intervention chirurgicale suite à une anesthésie improprement réalisée.
Viennent ensuite Pavel Florenski, prêtre orthodoxe, théologien, scientifique, historien de la culture, condamné en 1937 à la peine capitale par la troïka du NKVD de la région de Léningrad et fusillé ; Vsevolod Meyerhold, grand metteur en scène, comédien, pédagogue, théoricien de l’art, arrêté en 1939, et qui a subi d’atroces tortures avant d’être exécuté en 1940 ; Alexandre Soljenitsyne, écrivain, publiciste, homme public, prix Nobel de littérature (1970), privé de sa citoyenneté soviétique et chassé d’URSS en 1974, et exilé en 1994.
Hommage aux victimes des répressions politiques
21 décembre 2017 au 18 mars 2018
Multimedia Art Museum, Moscou
16, rue Ostojenka
Moscou, Russie, 119034