Profondément honnête et incisif, Ray Cook est un artiste unique, mis à l’honneur par une nouvelle exposition intitulée Full Disclosure : The World of Ray Cook. Le vaste éventail d’œuvres présentées démarre avec ses premiers travaux (fin des années 1980), comme la série anarchique When my ship comes in, I’ll be waiting at the airport. Suivent ses réflexions visuelles provoquées par le désastre du SIDA, avec At first I was Afraid, I was Petrified (2002) ainsi que, avec Not with a bang but a whimper, son cheminement sur sa relation à la scène gay – et sa récupération par les courants traditionnels.
Qualifier un artiste de subversif parce qu’il aborde les tabous peut s’avérer simpliste, surtout s’il verse dans l’autobiographie, ce qui fait certes partie de la méthodologie de Cook. Son intention est cependant plus nuancée qu’on pourrait le croire de prime abord. Ses compositions sur la mort et la sexualité démontrent un équilibre finement étudié, avec des notes d’ironie, d’humour et de camaraderie. Artifices et théâtre sont omniprésents, au travers d’accessoires phalliques et de costumes roses par exemple, mais le burlesque maniéré se trouve atténué par l’humanité palpable de ses sujets, dont presque tous sont des amis ou des connaissances. Les décors criards souvent faits main contrastent suffisamment avec la mine vulnérable de ses personnages pour que réalité et fantastique se mêlent, aboutissant à un puissant distillat du vécu de l’artiste.
Comme en témoignent ses images et sa façon de jouer avec les contraires (moderne avec ancien, absurde contre sérieux), le photographe a réussi cet exploit en usant de nombreux procédés. Il sait dissocier le symbolique du matériel pour rendre son humanité intrinsèque à la sexualité « déviante ». Dans ses travaux éloquents et pragmatiques sur les effets physiques et psychiques du SIDA, il se moque gentiment du portrait libéraliste de l’homosexuel en tant que victime.
Malgré ses excès gothiques et éminemment clownesques, l’œuvre de Ray Cook reprend les questions fondamentales que nous nous posons tous dans la vie : trouver sa place, trouver l’amour et confronter l’inévitabilité de sa propre mort, quelque en soit le moment. Rassemblés en rubriques, ses groupes de travaux ne sont pourtant pas des entités distinctes mais des chapitres logiques d’une histoire continue. Le récit, une fois qu’on l’a compris, est admirablement cohérent, étonnamment personnel et désarmant de franchise.
Daniel Pateman
Full Disclosure: The World of Ray Cook
17 – 30 janvier 2018
Carmel by the Green
287A Cambridge Heath Rd
London E2 0EL
Royaume-Uni