Il y a 35 ans, le 17 juin, Diego Goldberg et sa femme Suzy, décident de se prendre en photo.
Diego, célèbre photojournaliste, choisit un format simple: Portrait sur fond sombre, absence de décor, travail de lumière identique. Chacun regarde fixement l’objectif. Le cadre est serré sur leurs visages, aucun artifice n’est utilisé, pas de visite chez le coiffeur ni recherche de maquillage. Seule la lumière modèle leurs visages, une technique de prise de vue classique en somme, simple et sans recherche d’esthétisme.Au fur et à mesure des années, la pyramide du temps s’organise. Les enfants viennent les uns après les autres, d’abord Nicolas avec son air de chérubin, puis Matias et ses grands yeux étonnés, et bien plus tard Sébastien plus beau d’année en année. Personne ne sourit ou à peine parfois. On voit aussi au fil des ans Diego portant des lunettes, Suzy changeant de coiffure, les enfants devenir des adolescents puis des hommes, tous les trois barbus comme leur Papa.
Les cheveux blanchissent, les rides s’installent, chacun nous révèle sa propre personnalité
Personne ne joue de rôle ici. La vérité rien que le vérité dans ces portraits touchants, émouvants, envoûtants, des présences à première vue passives et pourtant on ne peut se détacher d’elles. Comment, alors qu’aucun effet théâtral ne soit utilisé, sommes-nous si fascinés par ces photos ? Il y a peut-être la présentation fondée sur l’opposition nette entre l’ombre et la lumière qui projettent ces visages en avant, qui les jettent presque en dehors de leurs cadres. On a l’impression qu’ils s’approchent de nous, qu’on va pouvoir les toucher et pourtant ils sont la immobiles et attentifs, comme prêts à discuter.
Et oui, c’est bien d’une discussion dont il s’agit car Diego nous raconte une histoire, l’histoire de sa famille à travers le temps et à travers sa famille, nous voyons la nôtre. C’est de nous dont il parle, c’est nous qu’il montre et qu’il photographie. Les photos de sa famille deviennent les photos de toutes nos familles. Diego a capturé l’intensité de notre plus grande crainte : vieillir. Mais il le fait avec délicatesse et tendresse en photographiant ce qu’il a de plus cher, ses proches et en utilisant avec simplicité les incroyables pouvoirs de la photographie !
Il nous incite à avoir le courage de regarder la vérité en face quand les années passent. Diego nous montre le visage du temps qui passe.
Eliane Laffont, Fait a New York le 25 Janvier 2011
Fondatrice de l’agence Gamma (EU)
Co-fondatrice et présidente de Sygma Photo News f
Senior consultant Visa pour L’Image
