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Dave Heath – Dialogues with Solitudes

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Le photographe américain s’est fait une spécialité de saisir l’âme d’une foule et d’en faire transparaître toutes les variations individuelles. A Paris, le BAL lui rend les égards qu’il n’a pas eu de son vivant.

La jeune femme regarde vers le bas, une cigarette à la main, une tasse de café à côté d’elle. Elle semble être en pleine réflexion, comme pénétrée d’une intense pensée qui a avoir avec la vie, la mort et ce que nous faisons ici, dans ce bas monde, où nous nous perdons parfois dans des songes sans fin.

Ainsi sont les portraits de Dave Heath qui parvient à saisir la flamme d’une pensée sur le visage d’un anonyme. « Des figures dans lesquelles je me suis reconnu », dit le photographe qui a rassemblé ces clichés dans un livre intitulé Dialogue With Solitude présenté au début de l’exposition. Il dit être influencé par la Passante de Baudelaire : « un éclair…puis la nuit ! ». « Fugitive beauté ».

 Corée

L’éclair est cet instant saisi par le photographe dans les rues de villes américaines où il croise tout un chacun et en fait de saisissants portraits. Dave Heath a un don pour attraper ce qu’il y a derrière le masque d’un visage : la pensée profonde, le poids d’une conscience. Il s’y est adonné dès le début des années 1950 où, envoyé par l’armée en Corée comme mitrailleur, il capte les figures de ses camarades soldats et en fait ressortir toute l’intense réflexion qu’ils pouvaient alors nourrir. En rentrant aux Etats-Unis, le photographe en fera son sel : il parviendra à poursuivre cette étude des visages qu’il côtoie en se promenant dans les villes de son pays.

 Robert Frank, Lee Friedlander

Abandonné par ses parents à l’âge de quatre ans, Dave Heath aura une enfance plutôt malheureuse, ballotté entre familles d’accueil et orphelinats. A quinze ans, en découvrant un article dans Life, il se reconnaît et veut faire de la photographie. Plus tard, quand il rentre de Corée et entame le coeur de son oeuvre, il rencontre des difficultés à se faire connaître. Autour de lui gravitent pourtant des photographes comme Robert Frank ou encore Lee Friedlander qui seront ses amis, mais qui auront un succès supérieur au sien. Dave Heath ne dévie cependant pas de ce qu’il entreprend dès ses débuts : saisir la complexité d’un visage humain où peut se lire le sombre travail d’une pensée.

 Précurseur

« Il empli le cadre d’une absence », estime Diane Dufour, commissaire de l’exposition et directrice du BAL, « il est le filtre d’une époque aussi. Une époque où la bonne conscience américaine vacille à l’heure de la guerre du Vietnam et du combat pour les droits civiques des Noirs américains ». Et d’ajouter : « Dave Heath infuse tout cela grâce à ses photographies. Il s’en rend compte et le montre ». Précurseur, peu connu, il arrêtera un jour la photographie pour se consacrer à des travaux plus rémunérateurs. Mais il aura contribué à donner naissance à une façon de faire de la photographie, entre celle d’un auteur et celle d’une pratique documentaire, entre la volonté de révéler le commun et celle de sublimer avec une enveloppe obscure l’atmosphère. Le BAL rend un bel hommage à quelqu’un qui mérite une place de choix dans le panthéon des photographes.

 Jean-Baptiste Gauvin

 

Dave Heath – Dialogues with Solitudes

14 septembre – 23 decembre 2018

Le Bal

6, Impasse de la Défense

75018 Paris

www.lebal.fr

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