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Interview Robin Hammond

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L’année a été fertile pour le photojournaliste néo-zélandais installé à Paris Robin Hammond. En février, il a remporté le prix FotoEvidence du livre de l’année 2013 pour son photo-reportage au long cours, Condemned: Mental Health in African Countries in Crisis. Et en octobre, alors qu’il se préparait à se rendre à New York pour le lancement du livre, il a appris qu’il s’était également vu décerner la bourse pour une « photographie humaniste » du W. Eugene Smith Memorial Fund.


« J’ai souvent besoin de me pincer pour m’assurer que tout ceci est vrai et je dois reconnaître que j’ai beaucoup de chance », me dit-il avant de me révéler que c’est justement le travail de W. Eugene Smith qui lui a inspiré sa carrière de photojournaliste. « Je ne savais pas vraiment ce qu’était le photojournalisme quand j’ai commencé la photographie. Je pensais que je ferais peut-être du portrait ou du paysage, je n’étais pas vraiment sûr. Et puis je suis tombé sur un livre intitulé Minamata de W. Eugene Smith.” 



Depuis lors, Hammond a bâti sa carrière en utilisant son appareil comme un outil de sensibilisation. Aujourd’hui, avec la publication de son livre par FotoEvidence, Hammond dispose d’une autre corde à son arc. Il a l’intention, avec l’aide de Svetlana Bachevanova, la figure majeure derrière FotoEvidence, d’utiliser Condemned pour attirer l’attention du public sur la situation désespérée de ceux qui souffrent de maladies mentales en Afrique. « Nous allons envoyer le livre à de nombreuses personnes ayant des postes de décisionnaires à l’OMS et à l’ONU et dans d’autres organisations de défense des droits de l’homme », déclare Hammond, enthousiasmé par cette perspective.

Il est persuadé que la force de ce travail permettra à ceux dont il a fait le portrait d’être entendus. Derrière la couverture en noir et blanc de Condemned, on trouve des histoires empreintes d’un tel désespoir et d’une telle horreur abjecte qu’il est inconcevable que ce travail ait pu être réalisé au vingt-et-unième siècle. Mais c’est pourtant le cas et le courage déployé par Hammond pour traiter ce sujet pourtant impopulaire auprès des médias grand public démontre son engagement pour faire de la photographie un instrument de changement.

L’idée du livre est née en 2011 quand Hammond se trouvait au Sud Soudan pour couvrir le référendum pour l’indépendance pour le Sunday Times. Il remarqua une fille handicapée mentale en train de mendier sur le bord de la route et demanda nonchalamment à son chauffeur ce qui arrivait à ceux qui souffraient de semblables handicaps. « Nous les mettons en prison, me dit-il. Je lui répondis : très bien, allons voir en prison, et le reportage est né comme cela. »
Hammond négocia son entrée sur place et pénétra dans un monde où les malades mentaux étaient abandonnés par la société, sujets à la peur de leurs familles et au dédain des autorités.

Lors de son voyage suivant en Afrique, cette fois en Ouganda avec une ONG, il continua son reportage en restant après la fin de sa mission. Découvrant une situation similaire en Ouganda, il décida que cette histoire devait être racontée. « Il y a cette idée largement répandue que dans des situations d’après-guerre, comme en Ouganda ou au Soudan du sud, où des accords de paix ont été trouvés, tout se passe très bien. Mais pour beaucoup de gens, la guerre continue », dit-il.

Déterminé à raconter cette histoire malgré le manque d’intérêt des médias pour financer son travail Hammond s’est tourné vers le crowd-funding et en l’espace de deux semaines, le projet qu’il avait lancé récolta 15000 dollars de promesses de dons, ce qui lui permit de poursuivre. Quand il arriva au bout de cette somme, il demanda une bourse au Pulitzer Center for Crisis Reporting, qui lui fut accordée. « J’ai fait le tour de tous les moyens possibles pour financer un projet », dit-il.



Condemned: Mental Health in African Countries in Crisis décrit la situation dans huit pays d’Afrique – la Somalie, le Kenya, le Sud-Soudan, l’Ouganda, la République démocratique du Congo, le Nigeria, le Liberia, et le Sierra Leone. Dans un style qu’il qualifie lui-même de « classique », Hammond représente avec ses mots aussi bien qu’avec ses photographies en noir et blanc la situation désespérée dans laquelle se retrouvent ceux qui souffrent de maladies mentales.



Les images prennent encore plus de poids avec les interviews des patients, de leurs familles, du personnel médical et des officiels des différents gouvernements, leurs mots faisant écho à la réalité montrée par Hammond dans ses photographies – ces pays ravagés par des décennies de conflit sont sous-équipés pour faire face à la magnitude impressionnante des problèmes de santé mentale qui affligent leurs populations. Des gouvernements dépassés et manquant de ressources se désintéressent d’un problème que beaucoup pensent insurmontable. Au lieu de s’en occuper, ils enchaînent ces patients littéralement et allégoriquement.

FotoEvidence s’engage à amener au grand jour des histoires auxquelles peu de gens osent s’attaquer. Condemned: Mental Health in African Countries in Crisis est à n’en pas douter un travail difficile, mais ces gens méritent d’obtenir notre attention. Nous devons nous arrêter et accepter cette confrontation parce que ce n’est qu’au moyen d’une plus grande compréhension que le changement peut être initié.

Condemned: Mental Health in African Countries in Crisis
by Robin Hammond
Published by FotoEvidence New York
132 pages
73 black and white photographs
ISBN: 978-0-9894866-0-6

http://www.robinhammond.co.uk/
http://www.fotoevidence.com/

 

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