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Quentin Bruno, Qaraqosh

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En juin 2014, durant la Seconde guerre civile irakienne, Mossoul tombe aux mains des djihadistes de l’État islamique. Quelques semaines plus tard à 32 kilomètres, Qaraqosh la ville chrétienne subira le même sort. En une nuit, ses 50 000 habitants fuient alors la ville pour se réfugier à Erbil, la capitale du Kurdistan Irakien.

Durant plus de 2 ans, la ville désertée deviendra une base de l’EI qui s’en servira comme entrepôt, usine d’armes et centre d’entraînement. De nombreux tunnels serpentent la ville. Certains allant jusqu’à rallier Mossoul sur 27 kilomètres. Les maisons sont pillées, souvent brûlées de l’intérieur. Les églises sont dévastées, les symboles chrétiens brisés mais laissés en exposition. En tout, 62% des maisons seront partiellement détruites et 36% seront incendiées. Parmi les chrétiens, la lutte s’organise sous les ordres du général Benham, ancien gradé de l’armée irakienne, prenant la forme d’une milice chrétienne prête à libérer sa ville quand la bataille débutera. Plus de 300 hommes prennent les armes pour reconquérir leurs maisons et leurs églises. Certains sont étudiants, boulangers ou poètes, d’autres viennent de l’armée mais ne s’y sentaient plus à leur place en tant que chrétiens.

Le Ninive Plain Protection Unit (NPU) trouve de l’aide auprès des américains qui leur fournissent des kalachnikovs, PKC et quelques semaines d’entraînement. Le 17 octobre 2016, la bataille de Mossoul commence enfin et les NPU en font officiellement partie. C’est à la dernière minute, 6 jours plus tard, qu’ils ont le feu vert pour attaquer aux côtés de la 9ème division de l’armée irakienne. 300 AK-47 sont livrés la veille par l’armée ainsi que quelques camions non-blindés pour transporter les miliciens.

Sur la route, les mortiers tombent aux alentours, les voitures-suicide explosent au loin. Les NPU se réjouissent à l’idée de revoir leur ville, ils dansent et tirent dans les airs. A peine arrivés, Jameel, Oussama, Zoher et Amer embrassent le sol de la capitale chrétienne dans leurs uniformes dépareillés. Tous brûlent d’impatience de s’engouffrer dans les rues poussiéreuses pour traquer les djihadistes. Les combats durent plusieurs semaines. Le nettoyage et le déminage plusieurs mois. La question de l’après commence à naître. Il n’y a plus d’électricité ni d’eau, la ville est détruite. Les derniers corps des djihadistes sont retirés par les troupes américaines.

Les civils retournent vers Qaraqosh constater les dégâts, filmer leurs maisons pour ceux partis à l’étranger. Les espoirs de retour s’estompent. Les NPU doivent aujourd’hui contrôler la ville et ses checkpoints filtrent les voyageurs entre Mossoul et Erbil. Ils protègent cette position stratégique que beaucoup envient au sein de la plaine de Ninive. L’excitation dans leurs yeux a disparu pour laisser place à la désillusion. Certains disent avoir perdu la foi, d’autres font des cauchemars des combats contre l’EI. Beaucoup boivent du whisky acheté à bon prix dans le seul magasin d’alcool d’une ville fantôme. Les travaux de reconstruction sont énormes, les aides internationales se font attendre. Les civils hésitent à revenir. De temps à autre, la cloche de l’église retentit pour les miliciens, Qaraqosh est en sursis.

 

 

 

www.quentinbruno.com

 

 

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