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Arles 2017 : Entretien avec Vincent Marcilhacy, directeur de Picto Foundation

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En 2016, le laboratoire parisien Picto créait son fonds de dotation photographique, pour accompagner et soutenir les progrès comme les épreuves de la photographie. En partenariat avec Picto, L’Œil de la Photographie vous propose de revenir sur cette aventure. Vincent Marcilhacy, son directeur, a répondu à nos questions.

Pouvez-vous nous expliquer les missions de Picto Foundation et son évolution depuis l’année dernière ?

Picto Foundation est avant tout le fruit d’une identité et d’un patrimoine, la volonté au fil du temps d’accompagner les photographes au cœur de leur métier. Créé à l’initiative de Philippe Gassmann, le fonds de dotation se confond avec cette culture singulière présente chez Picto, où la passion du savoir-faire et des échanges guide bon nombre de projets. Nous avons cherché à organiser nos énergies autour de programmes encourageant la notoriété des photographes et la préservation de leurs œuvres.

Le volet « Promouvoir la photographie » vise à aider l’émergence et la reconnaissance des auteurs. Il rassemble une série de Prix créés ou soutenus par le fonds de dotation. Des Prix historiques comme le Prix Picto de la Mode auquel nous donnerons cette année un nouvel élan ; des Prix accompagnés plus récemment, comme le Prix Niepce ou le Prix de la Photo Madame Figaro.

Nous voulons aussi faciliter la visibilité des travaux des photographes. Le volet « Partager la photographie » concerne le soutien aux expositions et à l’édition. Cela concerne les Rencontres de la Photographie, les Promenades Photographiques de Vendôme, Paris Photo, et certains éditeurs dont la démarche s’intéresse à l’objet photographique. Nous accompagnerons en fin d’année la BnF dans le cadre de l’exposition « Paysages français. Une aventure photographique, 1984 – 2017 » élaborée par Héloïse Conésa et Raphaële Bertho.

Enfin, et c’est une dimension qui me tient particulièrement à cœur, nous restons très attentifs à « Préserver la photographie ». Il s’agit de la défense du métier et de ses savoir-faire. Cela prend la forme par exemple d’une collection d’objets d’artiste ou d’initiatives visant à soutenir les étudiants en écoles de photographie et d’arts visuels.

Le Fonds de dotation Picto soutient le Prix Niepce. Quel est l’objectif de cet engagement ?

Nous sommes très fiers d’avoir pu rejoindre l’aventure du Prix Niepce. Si les photographes ont besoin de soutien pour émerger, il est important aussi de rester présent pour donner un second souffle à sa carrière. C’est le sens de ce Goncourt des photographes pour lequel nous nous engageons dans la durée.

Pour le Prix Niepce, nous avons opté pour la mise en place d’une dotation originale. Nous garantissons chaque année la conception et la fabrication avec le lauréat d’un objet d’artiste en édition limitée, à partir d’une série identifiée avec le lauréat et de l’ensemble des savoir-faire disponibles au laboratoire. Le premier objet d’artiste, D’ARGILE, a été réalisé en 2016 avec Laurence Leblanc. Nous accompagnons actuellement Olivier Culmann dans la création d’une nouvelle édition qui sera présentée à l’occasion de Paris Photo.

La création de cette structure de mécénat semble apporter une dimension patrimoniale et une forte identité à votre société. Peut-on parler d’un désir de rassembler et d’évoluer, à une époque où la fonction du laboratoire photographique et ses offres doivent se réinventer ?

En réalité, nous pourrions aborder la question de deux façons…

Dès la création du laboratoire dans les années 1950, Picto a nourri une ambition de passeur et de plate-forme au service des photographes. Longtemps conduite autour de la devise « Voir avec le regard de l’autre », tout le développement du laboratoire s’est fait dans cette recherche d’une meilleure compréhension et d’un dialogue constructif avec les auteurs. Dans ce sens, la création de Picto Foundation trouve sa logique dans le patrimoine même de la maison, et utilise les outils modernes de philanthropie, comme les avantages offerts par un fonds de dotation.

Mais vous avez raison, il s’agit aussi d’innover et de rassembler ! Les photographes ont besoin de soutien pour produire, exposer et vivre de leur photographie ; la photographie dont ils sont les artisans, a quant à elle acquis une portée considérable auprès d’une audience large et diversifiée, du grand public en passant par le BtoB. Le rôle d’un fonds de dotation comme Picto Foundation consiste à réunir les énergies pour favoriser la création de projets créatifs au service des photographes et des partenaires qui les accompagnent.

Picto Foundation réunit plusieurs donateurs qui interviennent de façon transversale ou ponctuelle sur la programmation. C’est le cas du Cabinet Exelmans qui nous a rejoint dernièrement pour soutenir le volet associé aux Prix. Cette année, nous accompagnent également Hexis et Hahnemühle dans le cadre d’un programme conçu pour les étudiants européens en écoles de photographie avec Paris Photo et Gares & Connexions…

Pouvez-vous nous en parler en détails  de ce nouveau programme, Carte Blanche Étudiants 2017, réalisé avec Paris Photo et Gares et Connexions ?

Le projet est né d’une volonté commune avec Paris Photo de favoriser une meilleure intégration des talents émergents, issus des écoles de photographie et d’arts visuels, au monde de l’art. L’idée a été proposée à Gares et Connexions qui a très vite signé pour en permettre la restitution dans le cadre d’une grande exposition Gare du Nord en octobre et novembre prochains.

Quatre jeunes talents seront sélectionnés, sur projet libre, suite à un appel à candidature auprès d’une cinquantaine d’écoles de photographie européennes. Parallèlement à la mise en espace de leurs œuvres dans la gare parisienne, les photographes seront présentés dans le cadre de Paris Photo et invités à y rencontrer différents professionnels.

Nous sommes particulièrement attachés à cette transmission des savoirs et à cette transition des générations au cœur de la profession. Depuis plusieurs années, Picto accompagne dans ce sens une quarantaine d’écoles de photographie pour permettre à leurs étudiants et enseignants d’utiliser les services en ligne du laboratoire à des conditions préférentielles. Picto Foundation s’est également associé cette année au Campus étudiants mis en place par les Promenades Photographiques de Vendôme, en permettant la mise à disposition d’un chargé de production du laboratoire pour assister les étudiants dans la réalisation de leur exposition.

Le Prix Picto de la Mode fête cette année ses 20 ans. Quel bilan tirez-vous de cette longévité ? Avez-vous une perspective particulière de développement ?

Le Prix Picto de la Mode a pris beaucoup d’envergure au fil des années. Nombre de photographes lauréats suivent désormais des carrières intéressantes dans le secteur de la mode et du luxe, tout autant que dans des univers davantage liés à l’exposition et au marché de l’art. Je pense à la talentueuse Charlotte Abramow primée en 2014, ou enore à la mention spéciale 2007, Kourtney Roy que l’on retrouve depuis sur de nombreux festivals, évènements et autres prix.

Un succès rendu possible avec la présence de partenaires fidèles comme le Pan Piper où a eu lieu la cérémonie de remise des Prix ces dernières années, ou JCDecaux qui donne chaque année une visibilité exceptionnelle au lauréat. Une réussite et une attente auprès des photographes qui nous ont donné envie de porter le Prix Picto de la Mode encore plus loin à l’occasion de sa vingtième édition. Le Palais Galliera, musée de la mode de la ville de Paris, rejoint le Prix cette année. Il accueillera la soirée de remise des Prix et sera associé au jury pour sélectionner les trois lauréats. Les œuvres des lauréats rejoindront la collection photographique publique du Palais Galliera. Nous nous félicitons de cette association qui ajoute au Prix Picto de la Mode, pour les photographes, une plus forte dimension institutionnelle.

La visibilité du Prix sera également renforcée avec deux partenaires médias. Madame Figaro qui poursuit son engagement après une première année de collaboration, et Fisheye qui s’associe au Prix avec la perspective d’une mise en avant originale pour les lauréats.

Vous avez aussi récemment créé une collection d’objets d’artistes utilisant la photographie. Que pouvez-vous nous en dire ?

Curieusement, peu de laboratoires ont réellement jusque là constitué de collection de photographie. Une réalité sans doute en cohérence avec la vocation première de l’artisan d’apporter un service sur mesure à son client. La question redevient pertinente dans la mesure où le rôle du laboratoire est aussi de s’intéresser à préserver un médium dont les récentes mutations techniques ont mis à mal certaines pratiques du métier.

Il y aura bien quelques tirages dans la collection constituée par Picto Foundation. Mais face à la multitude des collections privées qui existent depuis quelques années, notamment à l’initiative d’entreprises ou de leurs fondations, nous nous sommes demandés quelle pouvait être l’initiative plus singulière à notre portée…

De plus en plus d’artistes, de galeristes ou d’éditeurs imaginent et conçoivent des objets d’artiste en édition limitée. Ils répondent à la fois à une demande, soucieuse de trouver des œuvres plus accessibles, et à la tendance des créateurs eux-mêmes, curieux d’aller à la rencontre de nouveaux supports, de nouveaux langages. Nous nous sommes ainsi naturellement orientés vers la recherche d‘objets d’artiste utilisant la photographie, sous toutes ses formes de reproduction.

Parallèlement à l’intérêt de l’ensemble que nous espérons avoir constitué d’ici quelques années, il s’agit aussi pour nous de valoriser et de préserver les savoir-faire des métiers associés au laboratoire photographique.

Aujourd’hui s’ouvre la 48e édition des Rencontres de la Photographie d’Arles. Picto en est un des partenaires. Quelle est votre mission aux côtés du festival ?

Nous sommes très engagés aux côtés des Rencontres de la Photographie. L’énergie participative et la créativité décloisonnée promues par Sam Stourdzé et son équipe sont des valeurs qui nous correspondent parfaitement.

Le rôle de Picto Foundation pour le festival est avant tout d’être disponible et réactif pour répondre au mieux aux demandes et aux attentes des artistes exposés. La diversité de nos savoir-faire et des techniques disponibles chez Picto permet d’envisager une multitude de scenarii, qu’il s’agisse de tirage traditionnel à l’agrandisseur, de papier peint ou encore d’impression sur support rigide…

Chaque exposition produite est toujours une occasion de plaisir et de partage. Cette année nous avons choisi de mettre l’accent sur l’exposition de Mathieu Pernot. L’artiste revient sur sa série autour de la famille Gorgan, cette famille de gitans arlésiens que le photographe a suivi pendant vingt ans. Il rencontre la famille Gorgan en 1995 pendant ses études à l’ENSP d’Arles. « Face à face. Et désormais, côte à côte », c’est une relation particulière avec ces compagnons que Mathieu Pernot nous invite à suivre dans l’exposition Les Gorgan. C’est, modestement, cette même forme de proximité complice et fidèle que nous aimons entretenir avec les photographes et les enjeux de leur métier.

Propos recueillis par Jonas Cuénin

Plus d’informations sur Picto Foundation à :

http://www.picto.fr/pictofoundation/

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