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Maripolarama, Downtown New York sur polaroïds des années 70

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L’aventure Polaroid est au centre de l’histoire de la photographie. Le point focal. Un pont. Le passage de l’argentine au numérique. Le moment capturé aussitôt restitué. Tout, tout de suite. La modernité exige l’image instantanée. La styliste et photographe underground franco-américaine Maripol, l’une des gardiennes de la culture club des années 80, s’enfonce dans la ville et épingle ses habitants via l’œil du SX70, ce drôle d’animal déplié. L’invention d’Edwin H. Land a créé une complicité nouvelle entre le sujet et le photographe. Ils se partagent live le résultat. Réagissent. Recommencent. La photo Polaroid est une œuvre vivante. Et collective. Des tribus nouvelles mélangent les genres, les attitudes, l’art, le style, le désespoir, le bonheur d’exister. Il leur fallait un capteur familier qui flashe leur mise en scène. Maripol sera ce capteur.

Chacun de ses Polaroids est d’abord une histoire. L’histoire d’une relation. D’un jeu. D’une émotion. Avec la légèreté en prime. Sous leur aspect théâtral volage, les photos de Maripol recèlent à l’évidence le secret d’une époque, son éternité. Elle a capturé des visages aujourd’hui devenus mythiques qui évoluaient alors au Studio 54, au Mudd club et à la Danceteria : Grace Jones, Deborah Harry, Jean-Michel Basquiat… Et il y a l’ombre tutélaire qui plane sur tout ce travail, celle du gourou, du passeur, du maître des agencements, Andy Warhol, l’ami. On connaît la chanson. Le quart d’heure de célébrité de chacun d’entre nous. Encore fallait-il que cet instant magique ne s’évapore pas, qu’il soit fixé. C’est là tout le sens, toute l’utilité du travail de Maripol. Une archéologie de la grâce des moments envolés. « Tous ces moments, perdus dans l’enchantement, qui ne reviendront jamais », chantait Bryan Ferry.

Cette capture n’a été possible que par la proximité émotionnelle de la photographe avec ses sujets bien sûr mais aussi par la familiarité qu’ils entretiennent avec l’objet polaroid. Un objet ludique qui les invite à bouger, à se livrer. Avec insouciance. Il n’est qu’à voir la différence de leur comportement lorsque ces mêmes sujets se retrouvent face à la chambre, cet autre objet Polaroid dont la lourde machinerie les contraint à s’intérioriser, à s’immobiliser. En noir et blanc. Deux manières ô combien complémentaires de regarder et d’enregistrer la vie d’une génération qui sort des limbes de l’underground pour devenir un spectacle universel.

Baudelaire est l’inventeur de la poésie urbaine. C’était un temps où les mots prenaient toute la place, où Nadar commençait à immortaliser ses contemporains. L’œuvre de Maripol est l’alchimie de ce temps perdu que les années vont sanctifier. Une galerie des Fleurs du Mal d’un moment révolu sur laquelle se construit l’esthétique d’aujourd’hui. Un livre de poèmes au siècle de l’image. Des passantes qui ne disparaîtront plus. Notre histoire.

Jean-Yves Pilet 

Jean-Yves Pilet est un auteur français qui vit et travaille à Paris.

 

Maripolarama
Du 8 avril au 6 mai 2017
agnès b. femme
6 rue du Jour
75001 Paris
France
 
www.agnesb.com
www.maripol.com

 

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